Hier, on m’a félicitée. Alors que je travaillais, que j’accomplissais les mêmes tâches que je réalise quelques jours par semaine depuis que j’occupe cet emploi, entourée des mêmes personnes, hier on m’a prise à part et m’a félicitée. Félicité de quoi? Félicité d’être forte et sûr de moi en ne prenant pas en considération le regard des autres et en osant m’habiller comme je le désirais, c’est-à-dire en jupe et en robe ces deux derniers jours, mettant ainsi la prothèse que je porte à la jambe gauche bien en évidence.
Ma première réponse était alors: «Ben oui, il fait chaud dehors. »
C’est vrai, une partie de moi était touchée de voir qu’on reconnaissait le fait que de dévoiler clairement ce qui se cache généralement en dessous d’un pantalon, n’est pas tous les jours facile. Mais la partie militante de moi ne voulait pas être félicitée pour ça. Que l’on applaudisse mon action de me sentir libre, isole cette action comme étant quelque chose à laquelle on ne s’attend pas, comme étant un exploit que la majorité n’oserait pas tenter. Dans un monde idéal, cette action ne devrait pas surprendre, cette action devrait passer aussi inaperçue que lorsqu’une personne ayant deux jambes et deux bras les dévoilent quand la chaleur augmente en été. Au fond, c’est ce que je prône en me montrant aussi normalement que le feraient d’autres personnes ne présentant pas cette différence; que c’est tout aussi normal que je le fasse!
Je sais bien que cela fait partie d’un langage inconscient, que le message qu’elle voulait m’envoyer n’était pas celui que je décris ci-haut. Son message venait en fait d’un sentiment de pure admiration qu’elle tenait à me partager. Elle admirait ma façon de surmonter ces petites embûches qui ont été mises sur mon chemin, elle m’a vue à ce moment comme un exemple à suivre. C’est pourquoi j’ai sincèrement apprécié ce compliment, et c’est pourquoi je l’ai remercié de me l’offrir.
Je tiens donc à reprendre l’essence de son discours pour à mon tour féliciter et encourager tous les gens vivant avec une différence, visible aux autres ou non, de ne même pas prendre la peine de se questionner. Ne vous attardez pas à ce qu’on pourrait voir, comprendre, observer ou déduire; le droit de se dévoiler est accessible à tous, peu importe ces détails. Prenez-le.